Chapitre 16
UN CIERGE, EST-CE SUFFISANT ?
LE CAS D'ANDRÉ FROSSARD
1. Les temps d'éclairage :
Dans toutes mes descriptions des exercices méthodiques de Mixage
phosphénique, j'insiste sur la nécessité d'un éclairage assez fort ou, plus
exactement, un total de flux lumineux assez important, sans être excessif,
pour cueillir les fruits de cette pratique. Avec le soleil,
fixation de deux
secondes ; repos de trois minutes et recommencer. Bien entendu, il
faut préparer la pensée avant la fixation, la répéter pendant ; puis
durant les trois minutes consécutives.
Avec une lampe de 75 à 100 watts placée à un ou deux mètres de distance,
trente secondes de fixation, extinction de trois minutes et
recommencer. L'exercice mental associé est le même qu'avec le soleil.
Je rappelle entre bien d'autres exemples, que les sorciers pygmées fixent
une grande flamme pour avoir l'intuition du terrain où leurs chasseurs
trouveront du gibier.
Lors de la formation d'un phosphène, tout se passe comme pour la
photoluminescence : si l'on expose une plaque enduite de sulfure de
cadmium à la lumière, puis qu'on la mette en obscurité ; elle rendra la
lumière et sera donc luminescente. Mais, tandis qu'une certaine quantité
de lumière donnée en peu de temps provoquera cet effet, la même quantité
émise, par contre, en un temps plus long, ne rendra pas la plaque
luminescente. Car il s'agit de faire sauter des rangs aux électrons qui
retombent ensuite en émettant un photon ; tout comme pour faire passer
un ballon au-dessus d'un mur, on réussira du premier coup si la force est
suffisante, sinon, on n'y arrivera jamais. Donc, l'éclairage d'une bougie
est insuffisant.
2. Illumination et révélation mystique :
Y aurait-il des exceptions ? On serait tenté de le penser en lisant le récit
d'André Frossard, journaliste de la chronique "Cavalier seul" au Figaro,
si l'on en croit son livre
Dieu existe, je l'ai rencontré, (Éditions Fayard,
1969). Son aventure spirituelle vaut la peine d'être résumée, d'autant plus
que j'y trouve de curieux points de rapprochement avec la mienne.
André Frossard est né en 1915. L'illumination qu'il eut, s'est produite un
8 juillet (p. 141), au cours de sa vingtième année (p. 11). C'était donc en
1935 ou 1936, peu après qu'à dix-huit ans, j'ai rencontré Galip dont
l'imposition, en provoquant des visions, m'avait pour toujours lancé dans
la voie que l'on sait. Ce fut l'âge où je pratiquais avec le plus
d'acharnement les exercices que ce maître m'avait indiqués.
Le plus curieux est que l'illumination d'André Frossard s'est produite
tout près du lieu où je me livrais à cet entraînement : Frossard a eu sa
révélation en pénétrant par hasard à 17h10, dans la chapelle d'allure
gothique des soeurs de "l'Adoration Réparatrice", autrefois située rue
d'Ulm, à Paris, à peu près en face de l'École Normale, et aujourd'hui
remplacée par une extension de l'Institut Curie.
Et moi, je demande encore plusieurs fois par jour, à Dieu, pardon pour
n'avoir pas réussi à mettre au service de la prière associée à la fixation du
soleil, la terrasse exposée en plein midi, ainsi que son balcon et la rotonde
du salon, de ce prodigieux appartement au sixième étage du numéro 20 de
la rue Pierre Curie. Or, cette rue est de celles qui débouchent dans la rue
d'Ulm, la plus proche de cette chapelle ! Pour ces raisons, que cela lui
convienne ou non, je me sens fort lié à André Frossard.
Venons-en à cette chapelle car elle présentait une curiosité assez en
rapport avec le Phosphénisme : le fond de cette chapelle était assez
vivement éclairé. Les ornements étaient dominés par une grande croix de
métal qui portait en son centre un disque d'un blanc mat. Trois autres
disques de même dimension étaient fixés aux extrémités de la croix. Or,
nous avons vu l'importance de la lumière polarisée par réflexion, pour
l'ouverture à des contacts avec les mondes invisibles.
Condensons à présent le "curriculum vitae spirituel" d'André Frossard.
Ses parents étant socialistes, il n'a donc eu aucune éducation religieuse.
Totalement athées, lui et sa famille avaient dépassé le stade de
l'agressivité et de l'anticléricalisme, et en étaient arrivés à celui de
l'indifférence absolue envers les problèmes religieux qui leur paraissaient
d'un autre âge.
André Frossard entra dans cette chapelle par lassitude d'attendre à
l'extérieur un ami qui y avait pénétré pour quelques instants. Il raconte
ainsi le phénomène qu'il a vécu à cette occasion :
"Mon regard se fixe sur le deuxième cierge qui brûle à gauche de la
croix… C'est alors que se déclenche brusquement la série des
prodiges… commence l'avalanche à rebours… le ciel s'élance… C'est
un cristal indestructible, d'une transparence infinie, d'une luminosité
presque insoutenable… et plutôt bleue… un monde, un autre
monde… l'évidence de Dieu, l'évidence faite présence et l'évidence
faite personne… notre père… il est doux, d'une douceur à nulle autre
pareille… une douceur active, brisante, surpassant toute violence,
capable de faire éclater la pierre la plus dure et, plus dur que la
pierre, le coeur humain".
"Son irruption déferlante plénière, s'accompagne d'une joie qui n'est
autre que l'exultation du sauvé… je prends conscience de la boue dans
laquelle j'étais sans le savoir, englouti "… (pages 148 à 151).
"Le miracle dura un mois. Chaque matin, je retrouvais avec
ravissement cette lumière… Cependant, lumière et douceur
perdaient tous les jours un peu de leur intensité…"
3. Rapports entre le cas d'André Frossard et les phénomènes
phosphéniques :
Nous remarquons que tous les éléments signalés par Frossard font partie
des phénomènes que nous étudions.
a) Le début explosif, à l'occasion de la fixation de lumière :
Ceci rappelle typiquement le cas que j'ai rappelé plus haut, cité par
Flammarion et Jagot, de l'homme qui voit dans le reflet du soleil sur une
porte vitrée de restaurant, l'image d'un parent décédant à cet instant, et
dont il n'avait pas eu de nouvelles depuis longtemps.
b) La perception d'une lumière spéciale, consécutive à la pratique du
Mixage Phosphénique.
(Voir à ce sujet le chapitre "La Quatrième
Lumière ", dans L'Initiation de Pietro).
c) La marche à rebours des événements :
Souvent les personnes, en état de mort apparente, revoient leur existence,
mais en sens inverse, en remontant progressivement vers leur petite
enfance.
d) Le sentiment d'évidence :
J'ai étudié longuement dans plusieurs de mes ouvrages, principalement
dans Le Mixage Phosphénique en Pédagogie, le sentiment d'évidence qui
accompagne cet éclatement du fruit du mixage ; lequel, pourtant, était
complètement imprévisible par la logique et complètement déroutant pour
elle.
e) Le jaillissement centrifuge de la révélation :
"Le ciel s'élance, il s'élève soudain, fulguration silencieuse, de cette
insoupçonnable chapelle dans laquelle il se trouvait mystérieusement
inclus ". (page 148). Voilà qui est conforme à l'extension de la conscience
à partir d'un point de concentration. R. Steiner qui a recueilli à la
Théosophie quelques traditions hindoues, avant de les mélanger à ses
conceptions personnelles, affirme aussi que lorsque l'astral se révèle,
c'est comme s'il sortait de nous en un mouvement centrifuge.
f) La période d'un mois :
Galip, après m'avoir imposé les mains m'a dit : "Dans un mois vous serez
transformé ". Or, c'est un mois après que j'eus les visions décrites dans le
tome II de
Expériences initiatiques.
Plusieurs décades après, j'ai appris que le candidat à l'initiation
zoroastrienne, doit se retirer un mois dans un terrain sablonneux. Entretemps,
je m'étais rendu compte que c'est la durée pendant laquelle il faut
soutenir le courage du débutant, pour qu'ensuite il continue tout seul.
C'est d'ailleurs un rythme physiologique, puisque c'est la durée
nécessaire pour que l'immunité s'installe, après une vaccination.
Cette durée d'un mois, pour l'expérience d'André Frossard, rentre donc dans le
large cadre du cycle des expériences phosphéniques, ainsi que les autres
caractéristiques de ce qu'a vécu ce journaliste.
4. Quelles circonstances ont pu être à l'origine de cette initiation ?
Ceci nous fait poser un problème : Comment se fait-il que la fixation d'un
cierge pendant un bref instant, ait produit cet éclatement, autrefois
nommé "Initiation ", qui, d'habitude, ne survient qu'après au moins
quelques mois d'entraînement au Phosphénisme ?
Trois hypothèses sont plausibles et ont probablement joué chacune pour
une part.
1) Dans certaines congrégations, les moines, ou soeurs, prient en fixant
des cierges. Ceci joint au rythme des prières, donne, comme nous l'avons
signalé à propos du pèlerinage de Lourdes, un égrégore permettant une
télépathie de groupe très puissante. Ainsi, la substance phosphénique, en
oscillation, sous l'influence de la répétition régulière des litanies, a
" initié " André Frossard.
2) Une prédisposition karmique, liée à des incarnations antérieures. Mais
je pense que le karma se manifeste plutôt à travers les circonstances
susceptibles de provoquer ce genre d'épanouissement subit.
3) On peut se demander si André Frossard, dans son enfance, comme tant
d'autres, avait fait du Phosphénisme sans le savoir. De telle sorte que le
cierge du 8 juillet 1935, n'a été pour lui que l'étincelle qui a mis le feu au
tonneau de poudre qu'il avait, sans le vouloir, préparé longtemps
auparavant et gardé invisible en lui.
C'est l'hypothèse qui nous paraît la plus vraisemblable. Mais pour
l'affirmer, il aurait fallu que Monsieur André Frossard veuille bien
répondre à la lettre que je lui ai écrite à ce sujet.
Le cas d'André Frossard nous fait poser une deuxième question :
Pourquoi s'est-il rabattu dans le giron de l'Église romaine qui a tant
déformé cette science du rythmo-phosphénisme qui était à l'origine du
Christianisme ?
Élevé dans l'athéisme et en l'absence de toute pratique religieuse, il a
quand même eu une illumination mystique. Il a échoué là où il a pu, et où
il se trouvait à ce moment.
Quant à moi, j'ai eu la chance immense que, jusqu'à l'âge de douze ans,
ma mère me faisait faire ma prière tous les soirs. De plus, elle m'envoyait
me confesser, ce qui oblige à faire l'examen de conscience. De ces deux
pratiques surtout, je sais gré à l'éducation catholique que j'ai reçue, ainsi
que d'avoir porté à ma connaissance les quelques fragments des Évangiles
que le prêtre lisait à la messe. Étant parti de là, j'estime que j'ai pu aller
plus loin, en reconstituant le Christianisme originel, après en avoir
décanté les combines des empereurs romains et de leurs successeurs du
Vatican, qui en ont fait un instrument de domination.
Pendant que je terminais ces lignes à son sujet, j'apprends par le Figaro
du 9 mars 1988, qu'il vient d'entrer à l'Académie française. Félicitations !
Les basiliques de Lourdes superposées,
d'une architecture admirable.
Le Dr LEFEBURE qui a terminé son enquête
sur les circonstances ayant permis le développement
de la voyance de Bernadette par la pratique
involontaire du Phosphénisme.