Chapitre 9
AUTRE CAS COMPARABLE
À CELUI DE BERNADETTE : RASPOUTINE
Le docteur Méghan, près d'Anvers, étudie particulièrement les cas de
personnes ayant conservé un certain don de voyance consécutivement à
l'état de mort apparente. Heureusement, la pratique du Phosphénisme,
combinée à des respirations avec léger manque d'air, permet d'arriver au
même résultat sans être obligé d'aller jusqu'à une telle extrémité. (Voir Le
Pneumophène, ou la respiration qui ouvre les portes de l'au-delà).
A
L'origine du mysticisme de Raspoutine
Il est à remarquer que ce fut le même processus qui donna des pouvoirs
mentaux particuliers à Raspoutine. Tout d'abord, étant tombé enfant dans
l'eau glaciale de sa rivière sibérienne, il fut atteint d'une pneumonie
suivie de coma. À la sortie de ce coma, il eut sa première apparition qui
lui annonça qu'il guérirait complètement.
Plus tard, un soir au coucher du soleil, après avoir labouré en bordure
d'une forêt, il vit la Vierge lui apparaître dans le soleil pendant qu'il
faisait sa prière. C'est alors qu'elle lui révéla qu'il aurait une mission
envers la Russie. (Raspoutine, mon père ; Maria Raspoutine. Albin
Michel. 1966).
Si ce soir-là, il priait en fixant le soleil, on peut supposer qu'il faisait de
même les autres soirs, suivant une coutume instinctive de beaucoup de
populations campagnardes. C'est le phénomène de totalisation de la
pensée dont nous parlerons au paragraphe suivant, phosphénisée à son
insu, qui a déclenché cette vision.
À notre avis, il faut attribuer à cette coutume l'épanouissement de
certaines facultés cérébrales de Raspoutine. Relevons également sa
finesse d'esprit en psychologie, un pacifisme d'origine mystique pour
lequel il fut assassiné par un militaire de carrière ; son don, s'il était réel,
d'arrêter par des impositions des mains les hémorragies du tsarévitch, et
à coup sûr les visions de sa jeunesse qui ont déterminé sa destinée. En
outre, le mixage phosphénique développant l'intelligence et de grandes
possibilités d'adaptation à l'entourage, on peut lui attribuer aussi une
grande part de ses dons en psychologie et la subtilité de sa politique.
Mais néanmoins, il ne faudrait pas conclure que sa résistance aux poisons
soit due à ces entraînements. Il ne faut jamais traiter les problèmes en bloc
et à l'emporte-pièce, mais savoir les dissocier en leurs divers éléments.
Il ne faudrait donc pas exagérer les effets possibles de l'habitude de prier
en fixant le soleil en lui attribuant le pouvoir de donner une résistance aux
poisons supérieure à la normale.
En effet, à ce propos, signalons un très intéressant article du docteur
Albert Richard, professeur honoraire des facultés de médecine, paru dans
"Historama " n° 8 (octobre 1984), p. 81 : Raspoutine aurait résisté à une
dose vingt fois mortelle de cyanure de potassium, si ce poison avait été
pris en une seule fois, parce que cette dose avait été administrée en dose
fractionnée dans de petits gâteaux alors que le cyanure est détruit
rapidement dans l'organisme. L'expérience a été répétée sur des chiens
qui n'en mouraient pas. De plus, le sucre des gâteaux diminue l'activité
du cyanure. Enfin, l'autre poison qui lui a été donné, la curarine, a un effet
qui s'oppose à celui du cyanure, ce dernier accélérant la respiration tandis
que le curare la paralyse.
La mémoire de Raspoutine a été salie tant et plus par les militaires de tous
les pays du monde, après qu'un officier l'ait assassiné. Fils de pauvres
paysans sibériens, il savait que la guerre ne profite qu'aux riches et
n'apporte aux pauvres que la misère, même pour ceux du pays vainqueur.
Il avait dit au Tsar "Une guerre peut toujours être évitée ". Je pense que
la postérité lui rendra justice. La façon même dont il supporta toutes ces
diffamations sans répondre, fut une forme particulièrement profonde
d'humilité chrétienne.
Personnellement, je le considère comme un mystique de très haut niveau.
B
Raspoutine et la secte des Flagellants
Disons quelques mots de ce qui a surtout été reproché à Raspoutine.
Un jour qu'il rentrait de son champ au domicile paternel, il fit ce que l'on
pourrait appeler de la " troïka-stop ". Le conducteur du traîneau était un
moine appartenant à une des sectes de Flagellants. Ces derniers, apparus
en Italie au treizième siècle, se répandirent dans la plupart des pays
d'Europe jusqu'en 1349, époque à partir de laquelle ils furent interdits par
Clément VI. La flagellation avait pour eux une valeur presque
sacramentelle. Quelque temps après cette rencontre, Raspoutine se retira
pour plusieurs années dans le couvent des Flagellants.
Étudions les rapports entre la flagellation et nos recherches sur le
Phosphénisme. Le post-phosphène est l'impression para-lumineuse qui
persiste en obscurité après un éclairage un peu fort. Nous savons aussi
qu'il existe un équivalent du phosphène dans tous les organes des sens.
Par exemple, pour le sens du toucher : si nous avons reçu un coup un peu
fort, mais pas exagérément, ce n'est pas de suite que vient la douleur, mais
après un temps de latence. Elle monte alors assez rapidement, puis
s'atténue progressivement. C'est exactement la courbe d'évolution du
phosphène. Dans Exploration du cerveau par les phosphènes doubles, j'ai
donné une autre expérience, trop longue pour être résumée ici, de la
parenté entre le phosphène et la sensation consécutive à un choc
d'intensité moyenne.
Or, nous savons qu'un phosphène seul ne développe rien. Ce qui
développe les forces subtiles de l'esprit, c'est le mélange entre la pensée
et le phosphène.
D'une façon toute analogue, si nous mêlons une pensée à la sensation
consécutive au choc, nous accomplissons une variété de mixage entre la
pensée et un des éléments " phéniques " de l'organisme. C'est donc
également une voie d'éveil à l'un des aspects de cette force étrange qui
naît du mélange entre la pensée et un " phène ".
La flagellation du Christ a été l'extériorisation de cette vérité biologique.
Les moines qui priaient pendant la flagellation élevaient fort leurs âmes.
Ceci d'autant plus que l'onde qui se propage le long de la corde du fouet,
puis par elle, le long de la peau, est à l'image même de la vibration
universelle.
Mais si l'on se contente de la légère douleur du choc, sans y associer une
pensée précise, alors il se produit isolément un autre phénomène. Celuici
survient par cumul des complémentarités. En effet, la douleur dans la
peau est à la surface du corps. La jouissance sexuelle est en profondeur
dans l'organisme. Il y a donc attraction entre, d'une part, les deux pôles
opposés, douleur et joie ; d'autre part, entre surface et profondeur. C'est
pourquoi la flagellation est aussi un excitant sexuel.
Mais la pensée associée à l'acte sexuel prend une intensité plus grande,
tout comme celle associée à la fixation d'une forte lumière. Certaines
personnes ignorantes de toutes ces choses retrouvent ce chemin d'instinct.
Je crois avoir déjà cité quelque part le cas de cette dame qui était venue
me voir lorsque j'appliquais l'alternance des phosphènes doubles à
l'Institut Dynam. Elle m'avait confié que son mari étant très anticlérical,
elle lui cachait soigneusement que pendant les rapports sexuels, elle
récitait des "Ave Maria". Ah, si le mari avait su que jusque dans les actes
les plus intimes de la vie, il était ainsi "trompé"… avec la Sainte Vierge,
ce qui est le comble !
Alors, les trois en même temps : la flagellation, la sexualité, la prière ?
Pourquoi pas ; la pensée ne peut en devenir que plus intense.
Voilà ce qui a été reproché à Raspoutine. Ce qui aurait été orgie chez un
autre parce que purement physique, il avait appris dans la secte des
Flagellants à en utiliser la force pour l'intensification de la vie intérieure.
Mais ses détracteurs n'ont saisi que le côté extérieur.